L'ornithologie, c'est un peu comme le football, rien n'est gagné d'avance et on ne sait jamais ce qui va se passer. De bon matin, je retrouve mon terrain de jeu favori pour une petite sortie teintée de brume matinale. La Pie-grièche écorcheur est bien là, fidèle au rendez-vous.
Le Bruant jaune également. L'une et l'autre partagent le même espace et la même mission : nourrir leurs petits. Le bruant a un peu d'avance car sa première nichée est déjà bien émancipée. La deuxième ne devrait pas tarder. Par contre, les pies-grièches ne se reproduisent généralement qu'une fois par an.   
Mais la surprise du jour est certainement ce Pic cendré. Un juvénile qui découvre l'autonomie sans ses parents. Ainsi livré à lui même, il doit maintenant trouver seul sa nourriture. Grand mangeur de fourmis, il se délecte également d'autres insectes, de coléoptères et d'araignées. Et parfois de fruits aussi.
Le Pic cendré est sédentaire et peut passer toute sa vie dans la même forêt. Rare en Suisse - on estime entre 300 et 600 couples - il est considéré en danger sur la liste rouge des oiseaux menacées. Cette liste rouge est établie, pour la Suisse, par la Station ornithologique suisse selon les critères internationaux de l'UICN. Magnifique rencontre.
Je poursuis ma balade et me voici maintenant à proximité d'un territoire de Pies-grièches écorcheurs. Le couple est déjà en chasse. Il profite de capturer les insectes qui, à peine sortis de leur torpeur nocturne, se réchauffent au soleil. La Pie-grièche écorcheur est potentiellement menacée en raison des pratiques agricoles intervenues au cours des quarante dernières années. A savoir, la disparition des prairies, la suppression des haies ainsi que l'usage effréné d'insecticides.
Le plumage du mâle est détrempé suite aux nombreuses escapades dans l'herbe gorgée de rosée. Le couple semble me tolérer sur son territoire. Inutile de préciser que je m'approche par étapes et très très discrètement.
C'est la valse des aller-retours pour nourrir les jeunes cachés quelque part dans les buissons épineux là où ils sont mieux protégés des prédateurs. A tour de rôle le mâle et la femelle font le même rituel ; ils se posent, observent quelques instants, puis disparaissent dans les fourrés.
J'observe que les proies ramenées sont uniquement constituées d'insectes, alors que le régime alimentaire peut être également composé de petits mammifères et de reptiles. Une nichée pouvant accueillir de quatre à six jeunes, la besogne des parents est donc colossale.
Dans quelques semaines toute la famille partira en migration. Oiseau migrateur au long cours, la Pie-grièche écorcheur effectue une migration en boucle : le chemin vers ses quartiers d'hiver au sud de l'Afrique passe beaucoup plus à l'ouest que le chemin du retour vers la Suisse. Pour l'instant, profitons de ce merveilleux passereau à l'allure de rapace.
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